VTM autonomes : responsabilité des défaillances
Véhicule terrestre à moteur (VTM) autonome : responsabilité des défaillances. Responsabilités et exonérations selon le Code civil et le Code de la route.
VOITURE PARTIELLEMENT OU 100% AUTONOME
C.Becouze
7/1/20246 min read


Lorsqu’un VTM intègre l’IA, plusieurs questions se posent :
Quelles sont les causes des défaillances en cas d’accident ? La défaillance provient-elle du VTM autonome ou de l’IA ?
Qui devra assumer la responsabilité pénale en cas d’accident causé par une défaillance du VTM autonome ?
Le constructeur fabrique le VTM, mais il peut ne pas concevoir l’IA. Une autre entreprise pourrait fournir la technologie IA au constructeur. Selon l’article 1245-7 du Code civil :
« En cas de dommage causé par le défaut d’un produit incorporé dans un autre, le producteur de la partie composante et celui qui a réalisé l’incorporation sont solidairement responsables. »
En cas de défaillance d’un VTM entièrement automatisé, la responsabilité pourrait incomber au constructeur et au concepteur de l’IA.
L’engagement de la responsabilité du conducteur remis en question
Depuis 2021, le droit français compte dans son arsenal juridique une nouvelle ordonnance. Il s'agit de l'ordonnance 2021-443 du 14 avril 2021, qui permet d’adapter le Code de la route aux modalités d’interaction entre l’automobiliste et le système de conduite automatisée. De ce fait, cette ordonnance apporte une assise juridique en matière d’accidents de la circulation impliquant un véhicule équipé d’un certain niveau de technologie.
D'ailleurs, l’article L123-1 du Code de la route, issu de l’ordonnance du 14 avril 2021, précise que :
« Le conducteur doit se tenir constamment en état et en position de répondre à une demande de reprise en main du système de conduite automatisé. [...] ».
Il apparaît donc que le conducteur doit toujours être maître de son véhicule. Ce principe est d’ailleurs rappelé par l’article R412-6 du Code de la route. Malgré l’émergence des nouvelles technologies, ce principe fondamental demeure applicable.
Ce texte encadre ainsi l’attention que doit porter l’automobiliste lorsque son véhicule est en mode autonome, ce qui constitue une avancée juridique majeure en Europe. En outre, le 1er juillet 2021, Jean-Baptiste Djebbari, alors ministre des Transports, avait tweeté :
« C’est officiel : la France devient le premier pays européen à adapter son droit aux véhicules autonomes. »
Cette avancée législative ouvre de nouvelles perspectives quant à la responsabilité des acteurs impliqués dans l’utilisation des véhicules autonomes. En particulier, elle met en lumière la question de la responsabilité des constructeurs lorsque le système de conduite automatisé est en fonctionnement.
Défaillance des nouvelles technologies et responsabilité
En droit français, en cas de défaillance des systèmes technologiques, la répartition de la responsabilité entre conducteur et constructeur devient cruciale. D'où l'importance du décret n°2021-873 et des articles L123-1 et L123-2 du Code de la route. En effet, ils indiquent que seul l’automobiliste impliqué dans un accident de la circulation avec un véhicule hautement automatisé peut éventuellement être exonéré de responsabilité pénale en cas de défaillance technologique, et ce, uniquement si la défaillance est imputable au constructeur et que la conduite autonome a été activée conformément à ses conditions d’utilisation.
Pour comprendre pourquoi l’irresponsabilité pénale d’un automobiliste au volant d’un VTM de niveau 3 ne sera pas irréfragable, il convient de se référer à l’article 121-3 du Code pénal. Il est crucial de déterminer le point de départ de l’accident ou de l’infraction pour identifier la chaîne de responsabilités.
L’article 121-3 introduit deux types de causalité :
Causalité indirecte : Se produit lorsqu’un tiers, sans avoir directement provoqué le dommage, a contribué à sa réalisation en créant une situation à l’origine du dommage.
Causalité directe : Lorsque le comportement d’un tiers a contribué à une situation ayant permis la réalisation du dommage, ou lorsqu’il aurait dû intervenir et ne l’a pas fait. Cela peut résulter d’une imprudence, d’une négligence ou d’un manquement à une obligation de prudence.
De ce fait, le lien de causalité se définit donc comme le lien de cause à effet entre la faute d’un tiers et le préjudice subi par une autre partie.
En outre, ledit article fait également référence à la notion de force majeure, définie à l’article 1218 du Code civil, dont les caractéristiques sont :
Extérieur : Indépendant de la volonté de celui qui s’en prévaut.
Imprévisible : Ne pouvant être anticipé.
Irrésistible : Insurmontable.
De ce fait, en cas de défaillance du système autonome, le conducteur engage sa responsabilité si sa manœuvre entraîne un accident ou une infraction.
Responsabilité du constructeur en cas de conduite autonome
En ce qui concerne la responsabilité des constructeurs lorsque les véhicules sont en mode de conduite autonome, l’article L123-2 du Code de la route fournit des précisions essentielles :
« Pendant les périodes où le système de conduite automatisé exerce le contrôle dynamique du véhicule conformément à ses conditions d’utilisation, le constructeur du véhicule ou son mandataire [...] est pénalement responsable des délits d’atteinte involontaire à la vie ou à l’intégrité de la personne [...] lorsqu’il est établi une faute [...] ».
Le texte prévoit également que :
« [...] lorsqu'une manœuvre effectuée par le système de conduite automatisé contrevient à des règles dont le non-respect constitue une contravention, le constructeur du véhicule ou son mandataire [...] est redevable pécuniairement de l'amende encourue ».
De ce fait, lorsque le conducteur d’un véhicule partiellement autonome (de niveau 3) n’a plus le contrôle sur ce dernier, il ne pourra pas être tenu pour responsable des accidents ou infractions commis par le véhicule.
Par ailleurs, en plus de l'ordonnance n° 2021-443 du 14 avril 2021, il existe aussi le décret n° 2021-873 du 29 juin 2021 publié au JO le jeudi 1er juillet 2021. Cette ordonnance et ce décret apportent une nouvelle réglementation des VTM dotés d’une assistance à la conduite.
Exonération de responsabilité pour le constructeur et le concepteur de l’IA
Le constructeur et le concepteur de l’IA peuvent être responsables pour une défaillance d’un VTM entièrement automatisé. Ils doivent indemniser les victimes des préjudices causés.
Le constructeur peut-il se retourner contre le concepteur de l’IA ? Oui, le constructeur reconnu responsable pourra invoquer la responsabilité contractuelle du concepteur de l’IA.
Le concepteur de l’IA peut-il éviter sa responsabilité ? Selon l’article 1245-10 du Code civil, « le producteur de la partie composante n’est pas responsable s’il établit que le défaut est imputable à la conception du produit dans lequel cette partie a été incorporée ou aux instructions données par le producteur de ce produit. » Ainsi, le concepteur peut éviter d'engager sa responsabilité sous certaines conditions.
Le constructeur peut-il éviter sa responsabilité ? Selon l’article 1245-10 du Code civil, « le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve […] que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut. » Ainsi, le constructeur pourrait éviter d'engager sa responsabilité si les connaissances disponibles à l’époque ne permettaient pas de détecter le défaut.
Responsabilité en cas d’absence de faute du constructeur et du concepteur
Qui devra indemniser en cas d’accident si le constructeur et le concepteur ne sont pas responsables ? Si le constructeur et le concepteur de l’IA ne sont pas responsables, il faudra se tourner vers l’article L123-2 du Code de la route. Cet article engage la responsabilité du constructeur d’un VTM avec un certain niveau d’aide à la conduite, à condition que la conduite autonome soit activée conformément aux « conditions d’utilisation ». Sinon, la responsabilité pourrait incomber à un tiers responsable de l’entretien du VTM.
L’article L123-2 du Code de la route s’applique aussi bien aux VTM partiellement autonomes qu’aux totalement autonomes.
Faut-il modifier l’article 1245-10 du Code civil pour les VTM totalement autonomes ?
Oui, il est nécessaire de préciser que l’exonération de responsabilité ne s’applique pas aux VTM totalement autonomes. L’article devrait stipuler : « le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve […] que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler le défaut. »
Cette modification permettrait d’appliquer l’article L123-2 du Code de la route aux VTM autonomes, même si le constructeur peut éviter d'engager sa responsabilité selon l’article 1245-10 du Code civil.
Responsabilité du tiers chargé de l’entretien
Si un tiers est responsable du mauvais entretien du VTM autonome, il pourrait être tenu responsable en vertu de l’article 121-3 du Code pénal, qui définit la causalité directe et indirecte.
La loi du 10 juillet 2000 précise que « la causalité est le critère qui permet d’apprécier la responsabilité pénale des tiers ».
On peut imputer la défaillance du VTM autonome au tiers si ce dernier a :
Permis au VTM de circuler sur une voie publique, ce qui a contribué à l’accident.
Failli dans son obligation d’entretien, altérant le fonctionnement du VTM et causant un sinistre routier.
Conclusion
Analyser la répartition des responsabilités entre le constructeur et le concepteur de l’IA d’un VTM autonome nécessite une attention précise aux défaillances et aux législations applicables. Les exonérations possibles selon l’article 1245-10 du Code civil et les modifications législatives nécessaires pour encadrer les nouvelles technologies sont cruciales. De plus, la responsabilité d’entretien par des tiers doit être strictement encadrée pour garantir le bon fonctionnement des VTM autonomes et éviter leur responsabilité pénale en cas de négligence.
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