Lien entre intelligence artificielle et droit d'auteur
En 2025, dans notre ère numérique actuelle, l’émergence de l’intelligence artificielle (IA) soulève de nombreuses interrogations, notamment dans le domaine du droit d’auteur. Alors que des systèmes d'IA créent de plus en plus de contenus, qu'il soit musical, littéraire, cinématographique ou même graphique, la légalité et la protection de ces œuvres deviennent des sujets de débats cruciaux.
L'IA DANS NOTRE SOCIÉTÉ
C.Becouze
2/12/20255 min read


Comprendre ce qu'est une intelligence artificielle en 2025
L'IA est un ensemble de lignes de code dont le fonctionnement repose sur des instructions préalablement établies par un être humain. Il s'agit donc d'un programme informatique capable d'accomplir des tâches précises. Néanmoins, à l'inverse d'un simple logiciel, l'IA a la particularité d'être un système de traitement de données conçu pour s'améliorer en permanence. En effet, grâce à des processus d'apprentissage automatique, comme le machine learning ou le deep learning, l'IA a la capacité d’enrichir sa base de données et d'affiner ses propres performances.
Malgré tout, chaque IA reste généralement spécialisée dans un domaine précis : elles sont très souvent monotâches. En effet, aucune IA n'est capable, en 2025, de dépasser son champ de compétences. L'exemple le plus flagrant est celui de l’IA Claude, développée par Anthropic, qui tente depuis le 28 février 2025 de terminer une partie de Pokémon Jaune. Cette expérience montre les limites des IA, car ladite IA n’a pas été entraînée pour interpréter un environnement de type Game Boy et éprouve donc des difficultés à comprendre ce qu'elle doit faire.
La création d'œuvres par l'intelligence artificielle générative
L'IA dite générative est entraînée grâce à un ensemble de données composé de divers paramètres lui permettant de créer de nouvelles images, textes, vidéos, jeux, etc. Il faut donc être en mesure d'identifier toutes ces différentes couches de données utilisées par l’IA générative : c’est là qu’apparaissent les défis juridiques. En effet, trois défis juridiques majeurs émergent :
1) L'obtention de l'autorisation préalable de l'auteur d'une œuvre
En France, une œuvre bénéficie d’une protection au titre du droit d’auteur. Il faut donc obtenir l'autorisation du créateur pour pouvoir l’utiliser légalement. En l’absence d’un tel consentement, l’auteur peut invoquer l'article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle¹, qui permet de protéger toutes les créations originales. De plus, l'article R.122-28 du même code² permet au titulaire d’une œuvre de s’opposer à son utilisation commerciale ou non commerciale.
Il est donc essentiel pour les développeurs d'IA de respecter les droits d’auteur, sous peine de poursuites judiciaires. Ce respect commence par le principe juridique fondamental du consentement de la personne concernée.
2) Les créations réalisées par une IA et un humain
Avec l’émergence des IA, des œuvres sont désormais générées par ces dernières. Partant du postulat que toutes les autorisations ont été obtenues auprès des différents créateurs (ce qui est rarement le cas), peut-on protéger une œuvre réalisée avec une IA ? En effet, une telle œuvre est-elle originale ? L'utilisateur a-t-il fourni un effort intellectuel suffisant pour en revendiquer la paternité ? Faut-il attribuer les droits d’auteur à l’IA elle-même ?
Ces interrogations peuvent être résumées en une seule : qui détient réellement les droits d’auteur sur une œuvre générée avec l’aide d’une IA ?
L’article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle³ stipule que :
« L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporel exclusif et opposable à tous. »
Toutefois, aucune définition claire d’« œuvre de l’esprit » n’y figure, et l’article ne précise pas qui détient les droits d’auteur sur une œuvre générée avec l’aide d’une IA. À ce jour (février 2025), le Code de la propriété intellectuelle ne prévoit rien de spécifique concernant les créations issues d’outils d’IA.
En droit français, seules les personnes physiques ou morales disposent de la personnalité juridique⁴. Une IA, étant un programme informatique, ne peut donc pas être titulaire de droits d’auteur.
Il faut alors se tourner vers l’entreprise conceptrice de l’IA, qui pourrait tenter d’invoquer l’article L.113-5 du même code⁵ :
« L’œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. »
Cependant, cet article ne s’applique pas lorsque l’œuvre est créée à partir de l'interaction entre un utilisateur tiers et l'IA, et non par les employés de la société éditrice. Ainsi, le détenteur des droits d’auteur pourrait bien être l’utilisateur ayant généré l’œuvre via l’IA.
3) L’absence de reconnaissance d’une protection du droit d’auteur pour une IA
Prenons l’exemple de Ai-Da, artiste-peintre 100 % électronique⁶. Ses œuvres sont produites à l’aide d’algorithmes d’IA avancés. En France, le droit d’auteur repose sur la reconnaissance de la créativité et de l’originalité, attribuées à une personne physique ayant fourni un effort intellectuel.
Même si les IA sont capables de traiter d’immenses quantités de données pour produire des œuvres, elles ne peuvent pas bénéficier de la protection du droit d’auteur, car ces œuvres résultent de calculs algorithmiques sans intervention directe d’un être humain.
Les défis juridiques à l’ère du numérique
Selon les lois en vigueur dans de nombreux pays, le droit d’auteur est réservé aux auteurs humains. Par conséquent, les œuvres générées par des IA échappent souvent aux protections juridiques classiques.
Par ailleurs, il semble nécessaire d’instaurer une obligation de transparence quant à l’usage de contenus générés par IA. C’est dans ce contexte que les États-Unis ont présenté, en avril 2024, un projet de loi intitulé Generative AI Copyright Disclosure Act of 2024⁷. De même, depuis 2024, avec le règlement européen sur l’intelligence artificielle⁸, l’Union européenne impose une transparence sur les données d’entraînement utilisées par les IA.
Il est en effet crucial d’indiquer qu’un contenu a été généré par une IA, pour des raisons éthiques, mais aussi pour distinguer les œuvres humaines des œuvres artificielles, puisque les protections juridiques et les implications financières diffèrent.
Ainsi, avec l’essor de l’IA, le droit positif doit impérativement évoluer afin d’encadrer plus précisément l’utilisation de ces technologies dans la société. Cette réflexion est notamment portée par Lawrence Lessig⁹, fondateur de Creative Commons, qui plaide pour des licences plus flexibles conciliant innovation technologique et protection des droits d’auteur. De même, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) envisage de nouvelles formes de licences et des cadres juridiques adaptés à cette nouvelle réalité. Enfin, le Parlement européen, dans sa résolution du 16 février 2017¹⁰, a déjà abordé la possibilité d’accorder une personnalité juridique spécifique aux robots autonomes les plus avancés.
Une harmonisation des législations à l’échelle internationale pourrait permettre de créer un cadre juridique commun favorisant un développement et une utilisation responsable de l’intelligence artificielle.
Notes de bas de page
Code de la propriété intellectuelle, art. L.111-1.
Code de la propriété intellectuelle, art. R.122-28.
Code de la propriété intellectuelle, art. L.111-1.
Code civil, art. 1832 et suivants (définition de la personnalité morale).
Code de la propriété intellectuelle, art. L.113-5.
Ai-Da, robot artiste développé au Royaume-Uni en 2019, reconnu comme première IA capable de créer des œuvres picturales.
Generative AI Copyright Disclosure Act of 2024, projet de loi américain présenté au Congrès en avril 2024.
Règlement européen sur l’intelligence artificielle (IA Act), en vigueur depuis 2024.
Parlement européen, résolution du 16 février 2017
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