Film « Ex Machina » : test de Turing et droit

Ex Machina : une exploration de l’intelligence artificielle et de l’éthique à travers le prisme du droit.

DROIT ET SCIENCE-FICTION

C.Becouze

7/29/20243 min read

Synopsis de « Ex Machina »

Le film « Ex Machina » fut réalisé par Alex Garland. Il s’agit d’un thriller psychologique qui plonge profondément dans les méandres de l’intelligence artificielle (IA) et des questions éthiques qui en découlent. Ledit film raconte l’histoire de Caleb, un jeune programmeur, qui est invité par Nathan, son patron, à évaluer Ava, un robot humanoïde doté d’une IA avancée.

Le test de Turing

Le test de Turing est une méthode pour déterminer si une machine est capable de montrer un comportement intelligent indistinguable de celui d’un humain. Dans « Ex Machina », Caleb est chargé de déterminer si Ava possède une conscience et une intelligence similaires à celles d’un humain, malgré sa nature artificielle évidente. Le film interroge ainsi la pertinence du test de Turing à l’ère des avancées technologiques modernes et des IA ultra-avancées.

Conscience artificielle et droit des IA

« Ex Machina » explore la notion de conscience à travers Ava, une IA qui ne se contente pas de répondre à des questions ou de réaliser des tâches, mais qui démontre également des émotions, de la créativité, et un désir de liberté. Ces caractéristiques soulèvent des questions fondamentales : qu’est-ce que la conscience ? Une machine peut-elle vraiment la posséder ? Si Ava est consciente, quels droits devraient lui être attribués ?

En outre, le film met en lumière les dilemmes éthiques entourant l’IA. En effet, Nathan, en tant que créateur d’Ava, exerce un contrôle absolu sur ses créations, sans considération pour leurs désirs ou souffrances potentielles. Cela soulève des questions sur le traitement éthique des IA : peut-on les utiliser et les exploiter sans considération pour leur bien-être ?

Ces questions, qui relèvent de la science-fiction à l’heure de l’écriture de cette brève, sont pourtant au cœur du droit prospectif. En effet, la résolution du Parlement européen datant du 16 février 2017 envisageait la reconnaissance d’une personnalité juridique future pour les robots. Cette proposition introduit trois types de personnalités juridiques :

  • Personnalité physique (les humains)

  • Personnalité morale (les sociétés)

  • Personnalité électronique (une certaine catégorie de robots)

Cette proposition soulève des questions cruciales sur le statut juridique des IA avancées comme Ava et sur les droits et obligations qui devraient leur être attribués. Si les IA pouvaient être reconnues comme ayant une forme de personnalité juridique, cela impliquerait de repenser leur place et leurs droits dans notre société.

En effet, une telle personnalité pourrait rendre un robot sophistiqué responsable juridiquement de ses actes et des conséquences qui en découleraient. Il faudrait donc que les robots sophistiqués aient un patrimoine, mais qu’il y ait, en plus d’un cadre juridique, des réponses pour l’incarcération, la détention provisoire des IA qui, comme Ava, tuent un être humain et en abandonnent un autre.

Responsabilité et éthique

Dans le film, Ava tue son créateur, abandonne celui qui voulait l’aider à être libre, et enfin, elle s’enfuit des lieux du meurtre. En écartant la possibilité d’une reconnaissance d’une personnalité électronique pour une certaine catégorie de robots (à mon sens, ceux dotés d’une IA), quelle alternative juridique reste-t-il ?

La réponse à cette question peut se trouver dans le droit positif français. En effet, le régime des produits défectueux pourrait s’appliquer aux IA. Selon ce régime, les fabricants sont responsables des dommages causés par des défauts dans leurs produits, même sans faute de leur part. Pour les IA, cela signifie que les créateurs ou les entreprises développant des IA comme Ava pourraient être tenus responsables des actions nuisibles ou des défaillances de ces machines. Le principe de précaution et la responsabilité civile peuvent également entrer en jeu pour les impacts des IA sur la société.

D’ailleurs, le Conseil consultatif national d’éthique a également commencé à explorer les implications éthiques des IA. Ces régulations visent à garantir que les IA sont développées et utilisées de manière éthique, respectueuse des droits humains et bénéfique pour la société.

Enfin, au niveau européen, il existe un cadre numérique. Ce dernier joue un rôle essentiel dans la régulation des IA. Ainsi, l’AI Act (dit aussi RIA) propose une régulation spécifique aux IA, visant à encadrer leur développement et leur utilisation afin de respecter les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union européenne.

Par conséquent, « Ex Machina » est un film qui non seulement divertit, mais aussi pousse à la réflexion sur les futures interactions entre humains et IA. En examinant le test de Turing, la conscience artificielle et les dilemmes éthiques, il soulève des questions importantes pour le droit et la société. En France, comme ailleurs, la législation devra évoluer pour répondre aux défis posés par les avancées en IA, assurant un équilibre entre innovation technologique, respect des valeurs éthiques et des droits humains.

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